jeudi 7 août 2014

34 ieme jour sans eau ni électricité, spleen, tristes Cévennes

 Une oeuvre d'art, de Josée, qui n'aimait ni rester inactive, ni acheter -ou que Marguerite achète- ce qu'on avait déjà. Comme moi. Elle avait - en un sens- été jetée au rebut, elle s'attachait à faire revivre les objets également mis au rebut d'une autre vie, meilleure ! 



Temps gris, d'automne, ce n'est pas plus mal. Est-ce l'absence de café ou sa diminution drastique ? Un peu de déprime ce matin, cauchemars même! ce qui ne m'arrive jamais. Ou la mésaventure d'hier soir -il faisait nuit- en allant marcher vers les "Trois pins" avec les chiens? Une voiture lancée à fond a failli nous écraser ; en entendant le vrombissement et voyant les phares, j'ai tiré Tess par la laisse.. qui a lâché  si bien qu'elle s'est retrouvée au milieu, seule.. j'avais mon gilet fluo et une lampe, je me suis précipitée vers elle et le gars a obliqué au dernier moment.

Ici, il n'y a quasiment plus de chemins pour marcher, à moins d'être un randonneur tout terrain grimpant les sentes caillouteuse... mais même les chemins de randonnées ou les chemins tout court ont parfois été barrés ou rendus impraticables par des riverains, surtout s'ils conduisent à la rivière, de toutes manières polluée. Pour leur "tranquillité"!  Ou pour le fric : une maison longée par un chemin communal, surtout s'il est en surplomb ayant moins de valeur à la revente ou à la location d'été, le barrer fait une plus value assurée. Trois ou quatre pèlerins par jour et ça les dérange, il y a des gens comme ça. Si on y ajoute les hons en voiture, fini les longues ballades. Un peu de tristesse, devant la passivité de ceux qui laissent faire. Lorsque j'ai ré ouvert le chemin de la Roque, ce fut, outre le défrichage et le tronçonnage de troncs élégamment jetés en travers! (sportif).. un vrai combat avec le riverain. Gagné mais bon, pourquoi moi?..

Les Cévennes ont été bradées. Les vieux ne peuvent plus se défendre et des investisseurs en profitent pour accaparer des chemins, des sites voire des terres.. et en sus y opérer quelques saccages écologiques (abattage de ripisylves par exemple.) Lydie était navrée de la "coupe" du chemin de la Roque et parfois elle le disait : c'est en souvenir d'elle et de Guy que je l'ai ré ouvert, mais elle ne l'a pas vu. Demain est l'anniversaire de sa mort. Il me semble que c'était hier.

Au fond, tant mieux que mon hon de chien ait saccagé le massif de porcelaines, le temps et les efforts effectués pour rattraper le saccage m'ont occupé l'esprit et un peu fatiguée, j'y ai moins pensé. À peu près 9 h non stop le jour même (!) : en fait, il n'y avait pas 200 feuilles à ramasser dans l'herbe et à mettre en pot, mais, j'ai compté hier, 380 ! Et hier encore, il m'a fallu 2 ou 3 h pour les disposer de sorte que tous les plans soient arrosés par la pluie, je ne vais pas rester tout le temps, cette maison où je suis seule à présent me pèse et me colle comme un enfant superbe mais encombrant qui ne se résoud pas à vous quitter pour devenir autonome. Il reste à tondre et à élaguer deux ou trois lauriers devenus énormes. En aurais-je le courage? Il le faudra.

J'admire Marguerite qui y est restée seule si longtemps - avec moi aux vacances- ... et ensuite avec sa "jeune" soeur, Jo, ma douce tante, une quasi sainte durant 90 jours, se levant aux aurores pour que son aînée n'ait pas à faire la lessive (malgré ses ? 40 kg à peine et ses problèmes de hanche).. se bousillant les yeux pour trier des petits oignons sauvages que j'aimais tant.. et qui, un jour par ? 90? 100? se changeait en une sorte de démon clastique imprévisible et délirant..  Jo donc qu'il avait fallu mettre en HP, et, que, contre avis médical et surtout contre avis de Lydie (qui avait peur pour sa mère) elle en avait sortie! Il n'y eut plus de drames, ou minimes, jusqu'à la fin des deux femmes. Jo, toujours soucieuse de mériter une existence qu'elle devait croire usurpée (ni mari ni enfants, du coup elle avait en partie élevé ma mère et mon oncle, soigné sa mère jusqu'au bout tout en travaillant dans son magasin de modes puis de fleurs, Jo, une "sacrifiée" familiale - aimée cependant et même enfant, adulée par ses aînés-.. comme le sont parfois les dernières nées si elles sont restées célibataires). Jo ne cessait de s'activer, tout le temps, ménage, tout reluisait à lécher le sol, jardin, un superbe potager malgré la terre aride, dont elle enlevait les pierres! reprisages infinis le soir (il y a des couvertures qui sont de vraies oeuvres d'art, avec plus de reprises que de tissus (image) etc..

Elles me manquent tant toutes les trois. Leur ai-je assez dit, ou manifesté -car ici on ne dit pas, on n'embrasse pas ou très peu, on agit- que je les aimais autant? Non, sans doute, surtout Lydie, qui, il faut dire, était parfois.. passons : la guerre, le Puits de Célas, ça ne vous fait pas une jeunesse folle, d'où les dommages collatéraux pour la génération suivante, celle d'après guerre (48-50), la mienne. À nous aussi, il a fallu montrer, prouver à chaque instant de notre vie que nous méritions une existence involontaire qui, bien qu'en étant en un sens issue, jamais ne remplacerait celles, infiniment meilleures que la nôtre, des disparus dans l'horreur sous la schlague nazie.


Je viens de relire "Le dernier voyage" de Jorges Semprun, un héros, philosophe, auteur, espagnol républicain tendance libertaire devenu maquisard, puis déporté à Buchenwald, beau comme un Dieu en plus, et écrivain extraordinaire... -juste un poil, ô, très léger, de sexisme qu'il est le seul à qui on peut le pardonner, relié à ses hormones sans doute un peu excessives ! une santé de fer, Jorges, qui pense en premier aux jambes des visiteuses du camp et même sûrement à plus sans qu'il n'ose le dire.. lorsqu'il en sort juste lui même!-.. l'homme et l'auteur que j'admire le plus, ça doit l'origine de ce spleen. Et pourtant il parvient à être drôle, désopilant même. Lisez le et qu'on se le dise : quiconque -à part les analphabètes bien sûr- qui ne l'a pas lu est un hon définitif et irrattrapable.

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