jeudi 31 juillet 2014

24 ieme jour.. lettre à Etty.. Un peu de narcissisme




Etty Hillsum. Depuis que j'ai dévoré son journal, j'ai l'impression de la connaître comme une petite soeur, sainte admirable mais aussi un peu agaçante.. 

Narcissisme, 
66 ans, une sciatique -vaincue au bout d'un an- => un gus qui aménage avec une autre plus "confort" -les fragiles n'aiment pas les malades ou les handicapés- et de 9 (?) ans plus jeune... broutille certes dont j'ai honte de faire ici état... Mais un peu de narcissisme le soir à la bougie ne fait pas de mal, Etty, bien au contraire, quoique tu en dises, toi qui veut te libérer du plaisir quotidien ou constant de te regarder dans la glace.. et de te trouver jolie! Il est vrai, pardon, que tu n'as pas eu la joie de les atteindre, ces 66 ans, et avec ceux-ci toutes les vilenies de la vie qui dégradent, (j'entends les minimes et sordides aléas de la privilégiée que je suis qui ne méritent même pas une histoire, un remords ni presqu'un souvenir... "mais qui font qu'au soir de sa vie, on ne peut sans dégoût se regarder en face") -... bien qu'en trois ans de persécutions de plus en plus effroyables, tu en aies accumulé un concentré historique particulièrement atroce, toi qui, au bout de ta recherche de la sainteté et de la "compréhension", est morte à 27 ans, volontairement, à Auschwitz, embarquant dans le wagon avec le sourire dont tu ne te départissais jamais*. À tort. Tu aurais 100 ans et nous aurions bien besoin de toi aujourd'hui à Gaza.



* Etty Hillsum croyait naïvement, comme les occupants nazis avaient tenté d'en persuader les juifs, attitude particulièrement abjecte qui visait à les avilir en les mettant en rivalité les uns contre les autres... qu'il y aurait un "quota" de déportés, sans plus, et elle pensait qu'en consentant au sacrifice, elle sauverait quelqu'un d'autre; ainsi oscilla-t-elle entre acceptation de "piston" comme ses amis l'en suppliaient -sa situation le lui permettait provisoirement- et finalement le refus absolu de tout passe-droit..  ce qui entraîna son transfert dans un camp de transit, puis inéluctablement -elle le savait- vers Auschwitz et la mort -elle le savait aussi-. Son frère Misha, (pianiste virtuose sur doué qui aurait pu être épargné lui aussi) fit de même, mais pour des raisons différentes. En réalité cette notion de quota était un leurre pour empêcher toute révolte, chacun croyant jusqu'au bout pouvoir en réchapper, et il devint vite évident pour beaucoup -mais, du moins au début, pas pour Etty- qu'au bout du compte TOUS les juifs sans exception devaient périr.

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